SEROvie : L'impact des VBG sur les femmes dans les camps de misère
- Odelpa
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Dernière mise à jour : il y a 2 heures

Dans le cadre du projet "Assistance Psychologique Spécialisée aux Survivant(e)s de VBG", une session d'orientation cruciale a été organisée par la Fondation SEROvie, le 31 mars 2025, au Restaurant la Réserve. L'objectif était clair : braquer les projecteurs sur une réalité trop souvent ignorée, l'urgence des violences basées sur le genre (VBG) dans les camps de déplacés internes en Haïti, et ce, en mobilisant journalistes et influenceurs.
La salle, baignée d'une lumière douce, bruissait de conversations feutrées. Autour de tables nappées de blanc et de bleu, des journalistes, calepins et stylos en mains, se préparaient à prendre des notes. Leurs regards étaient captivés par le projecteur, où défilaient les diapositives de la présentation, révélant des chiffres et des témoignages poignants. Sur un pan de mur, des feuilles de papier affichaient les attentes de chacun, une mosaïque de questions et d'espoirs.
M. Vinson NOEL, psychologue mentor à la Fondation SEROvie, a pris la parole, dressant un tableau saisissant de la situation. Sa voix, empreinte de gravité, résonnait dans la salle, captivant l'attention de l'auditoire. Il a défini les différentes formes de VBG, soulignant leur impact dévastateur sur les victimes, en particulier les femmes et les filles.
Quand les mots définissent l'horreur
« La violence basée sur le genre est un terme générique désignant tout acte nuisible perpétré contre la volonté d'une personne et qui est basée sur des différences (de genre) fixées par la société entre les hommes et les femmes ». Ces mots, énoncés avec une gravité qui a glacé la salle, ont ouvert les portes d'un univers où la violence se décline en une multitude de formes : auto-infligée, interpersonnelle (familiale et communautaire), collective, économique, sociale et politique.
L'indignation face à l'inacceptable dans les camps
Dans ces lieux de fortune, surpeuplés et insalubres, la violence règne en maître. Les chiffres, issus des déclarations recueillies par la SEROvie, ont déferlé comme une vague, submergeant l'auditoire de la réalité brutale des camps. 6 488 incidents de VBG ont été recensés en 2024, un chiffre qui ne représente qu'une partie de l'iceberg, tant les victimes hésitent à briser le silence. La majorité des victimes sont des femmes et des filles, représentant 76% et 17% respectivement. Mais les hommes ne sont pas épargnés avec un taux de 5% de victimes et 2% sont des garçonnets. « Un total de 64% des incidents de VBG contre les femmes et les filles sont des cas de viols et d'agressions sexuelles, souvent perpétrés par des gangs armés. Ces chiffres sont alarmants, mais ils ne racontent qu'une partie de l'histoire », a précisé M. NOEL, la voix chargée d'émotion.
Il a poursuivi en décrivant l'environnement de ces camps, des lieux où la promiscuité, le manque d'éclairage et l'absence de toilettes adéquates créent un terrain fertile pour les agressions. Il a évoqué les femmes contraintes d'échanger des faveurs sexuelles contre de la nourriture ou des biens de première nécessité, une forme d'exploitation abjecte.
Des blessures invisibles, des âmes brisées: L'appel à l'humanité

« Derrière chaque statistique, une vie brisée, une âme meurtrie ». Ces mots de M. NOEL ont rappelé la réalité des souffrances. Les survivantes portent les stigmates de ces violences: traumatismes psychologiques, détresse émotionnelle, troubles du comportement, jusqu'à l'atteinte des croyances. « Les impacts peuvent s'observer dans différentes dimensions du fonctionnement de la personne », a expliqué M. NOEL. Il a pris le soin de détailler les conséquences dévastatrices de ces violences sur la santé mentale des survivantes. Il a évoqué les cauchemars, les flashbacks, l'anxiété, la dépression, l'isolement social, la perte de confiance en soi. « Ces blessures invisibles sont tout aussi réelles et douloureuses que les blessures physiques », a-t-il insisté, soulignant la nécessité d'une prise en charge globale, d'un soutien humain et compatissant.
Un cri du cœur venu des camps : le témoignage de Francesca BEAUJOUR

Depuis août 2023, Haïti est le théâtre d'une crise humanitaire sans précédent. Des milliers de personnes, chassées de leurs foyers, s'entassent dans des camps de fortune, des lieux où l'espoir s'amenuise face à la dureté de la réalité. Mme Francesca BEAUJOUR, vice-présidente du comité du camp Lycée Marie Jeanne, a témoigné de l'indicible, de l'horreur quotidienne vécue par les femmes et les enfants dans son camp. « La réalité est plus compliquée que ce que l'on peut imaginer », a-t-elle déclaré, la voix tremblante d'émotion.
Et de poursuivre : « Après avoir été chassés de nos maisons à Carrefour-Feuilles, nous avions trouvé refuge au Lycée. Malheureusement, au cours du mois de mars, les bandits armés nous ont démasqués encore et avons dû nous réfugier dans la cour d'une église mormone avec huit autres abris ». Ses mots, empreints de douleur et de résilience, ont résonné comme un cri du cœur, un appel à l'aide désespéré.
Francesca a décrit les conditions de vie précaires, l'insécurité permanente, la peur omniprésente qui ronge le quotidien des déplacés. « Bien que ce ne soit pas la réalité pour nous, issus du camp du Lycée du Cent-cinquantenaire, je suis consciente qu'il y a des femmes contraintes d'échanger des faveurs sexuelles contre de la nourriture, des jeunes filles violées dans l'obscurité des tentes, des enfants traumatisés par la violence », a-t-elle déclaré. Son récit poignant a illustré de manière saisissante les propos de M. NOEL, donnant une dimension humaine et concrète aux statistiques préalablement exposées.
Elle a également lancé un appel vibrant à l'État haïtien, l'exhortant à prendre ses responsabilités, à protéger les déplacés, à mettre fin à la violence, à offrir un avenir digne à ces femmes, ces enfants, à ces familles brisées.
Mobilisation médiatique et juridique : un impératif

Au cours de la deuxième partie de la journée, Mme Marjorie BERTRAND, spécialiste en genre, a présenté le cadre légal et les mécanismes d'accompagnement, insistant sur le rôle des médias dans la prévention et la réponse aux VBG. « Les médias sont des vecteurs d'information essentielle. Ils doivent informer sur les services disponibles, utiliser des formats adaptés et saisir les occasions stratégiques pour diffuser des messages efficaces », a-t-elle souligné.
En conséquence, un atelier pratique a permis aux journalistes et influenceurs de développer des compétences pour un traitement médiatique éthique sur les différentes thématiques abordées au cours de cet atelier.
La journée s'est clôturée sur une note harmonieuse, avec la remise de certificats, des prises de photos et un lâcher de ballons symbolisant l'engagement collectif pour un avenir sans violence.
Marc-Kerley FONTAL
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